j’ai rencontré le diable
Kim Jee-woon

DeterreLe dernier-né de Kim Jee-woon est un bon film, efficace et terrible, bien oeuvré techniquement, marquant. Difficile de ne pas lui reconnaître toutes ces qualités, tout particulièrement la puissance de réalisme des scènes gore qui raviront sans les fans du genre. Un bon nombre de bonnes idées scénaristiques rythment l’ensemble et font plutôt bien tenir sur la durée un concentré de violence sadique que pour ma part je n’avais jamais vue assumée avec autant de brio. Pour cela je dis bravo, même si ce cinéma n’est pas ma tasse de thé, loin s’en faut.

Ceci dit, malgré ces indéniables qualités, il reste que cette oeuvre et son auteur ne parviennent pas à se sortir du piège qu’ils se sont tendu : ne pas tomber dans le ravin à force de faire le malin. Je précise. Quelle est la loi du genre ? Le réalisateur se fout de la morale. Soit. Les femmes sont des corps-objets promis à la souffrance, les hommes des monstres de cruauté en puissance. Et ce au profit d’une jubilation toute démiurgique, celle du réalisateur, du voyeur manipulateur qui peut bien en rire même si, j’ose le croire, ça doit lui foutre les chocottes à lui aussi, cet univers. Ce cinéma offre autre chose au spectateur que des valeurs. On peut trouver à y redire, mais pourquoi pas. Appelons ça une overdose de sensations et d’émotions, se porter aux limites de la puissance jubilatoire de l’acte créateur, là où l’astuce doit primer, et qui se trouve être perceptible depuis le siège de cinéma.

Certes. OK. Très bien. Mais dans ce cas, il ne faut pas se louper. Et dans J’ai rencontré le Diable, Kim Jee-woon malheureusement se loupe dans le dernier tiers du film. A partir du moment où le film twiste, de manière assez subtile d’ailleurs, quand on comprend qu’on va désormais assister à l’inéluctable naissance d’un monstre, l’auteur perd de son brio et semble un peu perdu. Gérer l’absence de suspense psychologique devient trop compliqué. Les articulations narratives perdent de leur vraisemblance. Le film devient vraiment long et prévisible. Les clichés du genre qui étaient drôles au début du film deviennent un peu lourdingues, et on n’espère plus qu’une chose, c’est d’être ébloui pour pouvoir pardonner. On l’est alors de manière ponctuelle. Mais ça ne suffit pas.

Et voilà l’échec (relatif) du film qui devient comme le révélateur féroce de ce cinéma. A force d’évacuer les valeurs, de caricaturer les figures types pour en faire des agents de violence et de puissance, ce cinéma Sud-Coréen gore ne génère plus d’autre attente chez le spectateur que celle de ne voir que de la virtuosité pour se sentir comblé. J’ai rencontré le Diable est dans son genre un film brillant. Mais il n’est rien d’autre. Alors restons calmes.———

Jacques Danvin

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J’ai rencontré le Diable de Kim Jee-woon (Corée du Sud ; 2h21)

Date de sortie : 6 juillet 2011

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