French Touch
bilan cinéma 2014

FocusDes années que l’on n’avait pas vu ça ; pas moins de six films réalisés par des français dans notre top 2014 ! Le cinéma de ces français là est hybride : s’y fondent auteurisme affirmé et dédales narratifs, simplicité des enjeux et forme léchée.

Notre premier choix, que douze mois de salles obscures n’auront pas détrôné, c’est L’Amour est un crime parfait. Sorti mi-janvier, ce cinquième long-métrage des frères Larrieu confirme tout le bien que l’on pensait des Derniers Jours du monde (2010). Il est inutile de revenir en détail sur le film (cf. notre critique) : son spleen nonchalant, sa plastique majestueuse, son jeu d’acteur lunaire, L’Amour est un crime parfait faisait office, sans le savoir, de précurseur temporel à ces autres films qui ont traversé l’année comme de faux jumeaux. Tonnerre, La Chambre bleue, Mange tes morts, Horns.

Tous ces films ont, de près ou de loin, une intrigue policière en creuset. Que celle-ci soit dans les gènes du scénario ou qu’elle s’invite en un brusque mouvement d’humeur (la superbe rupture de Guillaume Brac dans Tonnerre), elle est ce fil rouge autour duquel se déroulent les envies de réalisateurs inspirés : la montagne chez les Larrieu, le monde gitan chez Jean-Charles Hue (Mange tes morts), la sensualité chez Amalric (La Chambre bleue), le fantastique dégénéré chez Alexandre Aja (Horns), les palpitations d’un village paumé chez Brac (Tonnerre).

La force picturale de La Chambre bleue (que l’on retrouve dans Ida de Pawel Pawlikoski), la rupture de ton de Tonnerre, un burn au cœur de caravanes dans Mange tes morts, le finale grotesque et dantesque de Horns : ce sont ces manifestations de pure mise en scène qui rappellent pourquoi l’on va au cinéma et pas devant sa télévision (se rappeler seulement de l’académisme de Gone Girl, Les Combattants ou Elle l’adore, films à scénarios, films sans boyaux). Non pas qu’on soit des obsédés de la virtuosité : cette année, les coquetteries déshumanisées de L’étrange couleur des larmes de ton corps et Under the Skin faisaient vraiment pâle figure face à la discrétion d’un The Homesman dont la seule justesse est le principal moteur d’une mélancolie sourde et, parfois, bouleversante.

Mais si ce cinéma français-là a tant convaincu cette année, c’est qu’on a aussi, semble-t-il, enfin retrouvé de vraies figures d’acteurs. La plus belle des preuves : Arrête ou Je Continue, dans lequel Emmanuelle Devos continue de creuser son sillon de femme, madame tout-le-monde une fois encore magnifique. Et si Mathieu Amalric apparaît dans trois des films sélectionnés (L’Amour est un crime parfait, Arrête ou Je Continue et La Chambre bleue), ce n’est pas un hasard : il est tout simplement le meilleur acteur de sa génération, sorte de cousin lointain d’un Matthew McConaughey que l’on retrouve dans… Interstellar, qui boucle notre top, mais sur la pointe des pieds. Le nouveau Nolan devant essentiellement sa grâce à celle de Matthew McConaughey et Hans Zimmer, et non au réalisateur, qui, une fois de plus, s’égare parfois dans un océan d’ambitions formelles et scénaristiques.

PS : Un mot tout de même sur Whiplash, dont le tempo survolté de la mise en scène fait écho aux exploits physiques de ses acteurs et musiciens. Le film cartonne, on en parle beaucoup, partout, et c’est mérité ! La simplicité de ses procédés fonctionne à plein.bub

François Corda

bub

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Top cinéma 2014

01 – L’Amour est un crime parfait
02 – Whiplash
03 – Horns
04 -Tonnerre
05 – La Chambre Bleue
06 – Mange tes morts : Tu ne diras point
07 – Arrête ou Je Continue
08 – Ida
09 – The Homesman
10 – Interstellar

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